Demi-journée pédagogique autour de Maths à Modeler
Le 27 novembre dernier, la HEP-VS organisait une demi-journée pédagogique autour de Maths à Modeler (cf. articles déjà parus sur le sujet dans Résonances), avec une conférence de Sylvain Gravier, directeur de recherche au CNRS (Institut Fourier – Université Grenoble Alpes) et des ateliers participatifs axés sur la résolution de problèmes sous l’angle des situations de recherche pour la classe (SiRC). L’événement, soutenu par proEdu, a rassemblé des enseignants, des didacticiens, des formateurs, des mathématiciens et des étudiants de toute la Suisse romande et de Grenoble.
Maths à Modeler est une initiative grenobloise remontant à 2003. Depuis, plusieurs antennes ont essaimé à l’échelle nationale et internationale, dont celle au niveau suisse créée à la HEP Valais en 2022, à l’initiative de Mickael Da Ronch, chargé d’enseignement pour la didactique des mathématiques, avec la collaboration d’Ismaïl Mili (HEP Fribourg) et de Marie-Line Gardes (HEP Vaud).
Dans le cadre de sa conférence, Sylvain Gravier a indiqué que l’approche de Maths à Modeler était devenue de plus en plus interdisciplinaire. Aujourd’hui, c’est à la fois un domaine de recherche, un support de vulgarisation, des actions de formation et un champ d’expérimentation didactique.
En classe, Maths à Modeler fait vivre aux élèves la démarche scientifique à partir de situations ludiques inspirées de problèmes de recherche en mathématiques discrètes, donc en lien avec la théorie des graphes et la géométrie combinatoire. Sylvain Gravier a décrit le fonctionnement des séances d’un atelier, dédiées d’abord à la dévolution, puis à la recherche et enfin à la préparation de la présentation lors de séminaires juniors. Le conférencier a montré les liens entre Maths à Modeler et le Plan d’études romand, explorant les MSN (mathématiques et sciences naturelles) et les capacités transversales.
Après la conférence, les ateliers organisés en petits groupes ont permis aux participants de tester des situations de MàM, de découvrir les connaissances mobilisées en mathématiques et de voir comment les appliquer en classe, du primaire au secondaire. Selon Mickael Da Ronch, le taux de satisfaction était élevé, certains participants étant restés bien après l’heure.
«Il n’est pas nécessaire d’avoir des connaissances sophistiquées des mathématiques pour en faire.»
Sylvain Gravier
INTERVIEW DE SYLVAIN GRAVIER
Maths à Modeler aide-t-il à changer la perception souvent stéréotypée des mathématiques?
Assurément. Maths à Modeler est présent non seulement dans certaines écoles, mais aussi lors de fêtes des sciences, comme MATh.en.JEANS. Notre objectif, c’est la démocratisation et la vulgarisation des mathématiques discrètes. Karine Godot, présidente de Sciences et malice, s’intéresse à ces questions pour modifier la perception des mathématiques. Dans sa thèse de 2022, Mickael da Ronch a examiné la pratique des mathématiques en médiation, dans un contexte culturel et muséal.
Lors du séminaire junior qui s’est déroulé en mars dernier à la HEP-VS et au cours duquel vous étiez intervenu à distance, ce qui était frappant c’était de voir qu’une classe de 7H du Bouveret et une autre du CO d’Anniviers avaient des interrogations similaires à partir de problèmes identiques. Lors de votre conférence, vous avez même élargi la comparaison jusqu’à l’université. Est-ce réjouissant ou inquiétant que Maths à Modeler mette tout le monde sur un pied d’égalité?
Dans les ateliers, peu importe l’âge et le niveau des participants, on sait par avance que beaucoup vont rencontrer les mêmes difficultés aux mêmes endroits. Cela signifie que le problème est suffisamment consistant, mais que l’obstacle n’est pas traité dans l’enseignement. En France, même à l’université, l’approche des mathématiques ne laisse guère de liberté pour interroger l’objet d’études et triturer la matière enseignée. Au niveau des deux classes, l’échange entre pairs est en revanche stimulant, car c’est le quotidien des équipes de chercheurs et tout l’intérêt des séminaires juniors. L’approche Maths à Modeler démontre qu’il n’est pas nécessaire d’avoir des connaissances sophistiquées des mathématiques pour en faire et apporter des preuves face par exemple à une situation de pavage. En classe, le problème donné par l’enseignant devient celui des élèves avec la phase de dévolution. A partir de là, c’est à eux de le malaxer et de le modeler.
Le point le plus difficile n’est-il pas de placer enseignants et élèves dans la posture de chercheurs?
En effet, car c’est tout le contrat pédagogique qui doit être redéfini. Lorsque c’est l’enseignant qui détient le savoir, les positions relatives de chacun sont claires, alors qu’avec Maths à Modeler il se retrouve dans une posture de chercheur qui ne sait pas tout, même s’il a bien sûr des éléments de réponse. Selon le principe de l’exigence de validation, si l’élève dit que c’est faisable, il aura à expliquer «Comment?» et si non «Pourquoi?».
Quel est le défi de Maths à Modeler?
L’enjeu, c’est l’appropriation par les enseignants, en vue d’une institutionnalisation. L’antenne suisse m’apporte un certain optimisme, car elle est portée par un établissement qui est au cœur de la formation initiale des enseignants, avec des moyens et une taille qui rendent les choses plus faisables que dans d’autres pays. De plus, l’équipe, composée de trois passionnés, a l’énergie nécessaire pour l’animer.
Propos recueillis par Nadia Revaz
Valise Maths à Modeler
Différents jeux issus de la Valise à surprises mathématiques
Antenne suisse Maths à Modeler basée à la HEP-VS
L’antenne dirigée par Mickael Da Ronch organise des ateliers participatifs animés par des chercheurs pour permettre aux élèves de travailler sur des problèmes mathématiques réels en les résolvant de manière ludique et créative, et de présenter leurs résultats lors de séminaires juniors se déroulant dans une HEP.
https://hepvs.ch/fr/recherche-et-innovation/laboratoires-et-antenne/antenne-maths-a-modeler-102/