Une citation
Variations autour de l’admiration
«[…] quand, pour ce volume sur l’admiration, j’ai posé autour de moi la question «Qui admirez-vous et pourquoi?», j’étais persuadée que j’aurais deux types de réponses: Type numéro un: Shakespeare, Victor Hugo, Proust, Kafka, Joyce, Rimbaud, Apollinaire; Purcell, Mozart, Beethoven, Schumann; Vermeer, Rembrandt, Van Gogh, Klee; Orson Welles, Ava Gardner, Robert Redford. Type numéro deux: mon père, ma mère.
Quelle ne fut pas ma surprise…
D’abord, je n’avais pas prévu un troisième type de réponse, qui fut d’une fréquence troublante: l’admiration, oh la la, sujet brûlant, à ne pas prendre avec des pincettes. Exemples de réponses: Oh, mais c’est très fort, l’admiration, ça n’arrive presque jamais (sous-entendu: et heureusement). Non, les grands écrivains, je peux m’en sentir proche, je peux les aimer, mais je ne les admire pas. Je reconnais le génie, mais je ne l’admire pas. Et je ne peux admirer que de loin; de près, on voit trop les défauts. Mais c’est terrible, l’admiration, c’est une forme d’aliénation, on y dissout sa propre personnalité.»
Marie-Claire Pasquier (sous la direction) in L’admiration – Miettes d’immortalité (Editions Autrement, Collection Morales n°26, 1999)