Une citation
Les jeunes se disent flemmards…
«La question, pour chacun de ces jeunes de la génération Z, est de savoir s’il souhaite être acteur de sa vie, spectateur, ou simple figurant, comme l’évoque la philosophe Claire Marin, dans son ouvrage Etre à sa place. Dans la dynamique d’orientation, il s’agit bien de cela, de sa place au monde qui passe par des choix scolaires. Investir sa motivation, prendre sa place au lycée ou bien “figurer”, voire “observer”, position du photographe, en retrait de la scène, jamais acteur. Cette place est évidemment plus aisée, c’est ce que les lycéens que j’accompagne nomment la “flemme”. Ils se disent souvent “flemmard”. Or, à mon sens, la paresse n’existe pas. C’est plutôt le choix de la facilité, dans un contexte de tentations maximales, que l’on pourrait qualifier d’“infernales” ou de “diaboliques”, selon les termes de deux lycéens. L’un disait: “C’est l’enfer, quand on a le choix entre passer son temps sur les jeux vidéo, les réseaux sociaux et un chapitre d’histoire-géo!” L’autre ajoutait: “C’est diabolique, ces deux mondes séparés!” Cela peut en effet séparer, générer un conflit intérieur de non-choix, qui inhibe le désir d’apprendre et installe dans une forme d’immobilisme de soi. “La seule paresse est celle de l’installation de soi dans l’immobilisme”, affirme Claire Marin. C’est toute la question de la place de chacun: l’investir ou non? Et laquelle, précisément? […] Pour les lycéens, la question se pose au moment de leur orientation, sorte de premier rendez-vous avec eux-mêmes. Pour la chercher, encore faut-il qu’ils croient à l’existence de cette place, quelque part. Et soient persuadés qu’elle leur permettra de s’amplifier, ou, selon l’expression de l’écrivaine Jacqueline Kelen, les “rendra amples”.»
Brigitte Prot in Génération Z – Libérer le désir d’apprendre (Odile Jacob, 2023)